La trichotillomanie

La trichotillomanie

Trichotillomanie : quand les cheveux deviennent le miroir d’un combat intérieur


🕯️ Ces gestes qu’on cache

Elle baisse la tête quand elle parle.
Ses doigts se glissent machinalement dans ses cheveux, à l’endroit où la mèche est plus fine.
« Je ne sais pas pourquoi je fais ça », murmure-t-elle.

Et moi, coiffeuse, je le vois, je le sens.
Ce n’est pas “juste une manie”. C’est une douleur qui cherche à respirer.
La trichotillomanie, c’est ce trouble méconnu où l’on s’arrache les cheveux, souvent en silence, parfois sans même s’en rendre compte.

Derrière chaque mèche arrachée, il y a une émotion qu’on ne sait pas toujours nommer :
le stress, la colère, la honte, l’angoisse… ou simplement ce besoin d’apaiser quelque chose d’invisible.


🌿 Comprendre la trichotillomanie

La trichotillomanie touche environ 1 % de la population, principalement des femmes, souvent dès l’enfance ou l’adolescence.
Elle se manifeste par un arrachage compulsif des cheveux, parfois accompagné de comportements répétitifs similaires (sur les cils, sourcils ou poils du corps).

Ce n’est ni de la folie, ni un manque de volonté.
C’est une manière inconsciente de gérer une tension intérieure.
Le geste apporte un soulagement momentané, mais laisse place à la honte et à la culpabilité.

Quand les mots ne suffisent plus, le corps parle.


🧬 Les causes : quand le cerveau cherche à se protéger

Les spécialistes expliquent la trichotillomanie par un ensemble de facteurs :

  • une réponse au stress ou à l’anxiété,

  • une habitude automatisée renforcée par le soulagement,

  • un déséquilibre chimique dans les circuits du plaisir et du contrôle,

  • parfois, une prédisposition familiale.

Le cerveau associe le geste à une sensation de détente.
Et plus ce geste se répète, plus il devient difficile de s’en libérer.
Ce n’est pas un manque de volonté : c’est un mécanisme de survie émotionnelle.


💭 Les comorbidités : quand la douleur s’invite ailleurs

La trichotillomanie ne vient presque jamais seule.
Souvent, elle s’accompagne d’autres troubles psychiques ou émotionnels.

Beaucoup de personnes qui s’arrachent les cheveux vivent aussi avec l’anxiété, la dépression, ou d’autres blessures invisibles.
Elles ne sont pas faibles. Elles sont épuisées d’avoir trop gardé en elles.

Les recherches montrent que 60 à 80 % des personnes atteintes présentent une autre difficulté associée.

Les troubles les plus fréquents :

  • Troubles anxieux : le stress ou la tension sont les principaux déclencheurs.

  • Troubles dépressifs : la honte et la perte d’estime de soi aggravent les symptômes.

  • Troubles du comportement alimentaire (TCA) : le besoin de contrôle et les émotions non exprimées s’y reflètent souvent.

  • TDAH : impulsivité, ennui, gestes automatiques.

  • Autres BFRB (Body-Focused Repetitive Behaviors) : comme la dermatillomanie (grattage de la peau) ou l’onychophagie (ronger ses ongles).

Ces comportements soulagent une émotion… mais finissent par la renforcer.


🌸 Les traitements efficaces contre la trichotillomanie

La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des solutions.
La trichotillomanie se soigne, à condition d’être accompagnée avec bienveillance.

🧠 Thérapies comportementales (TCC)

Les TCC et plus précisément le Habit Reversal Training (HRT) sont les traitements les plus efficaces.
Elles aident à reconnaître les déclencheurs, à identifier les émotions associées et à remplacer le geste par un comportement apaisant (serrer une balle, respirer, s’éloigner du miroir…).

On peut apprendre à écouter le corps autrement.
À sentir l’envie venir… et à lui répondre avec douceur, pas avec douleur.


👀 Et le regard des autres

Le plus douloureux, ce n’est pas toujours le geste, mais le regard : celui des autres, celui qu’on imagine, celui qu’on finit par poser sur soi.

Beaucoup se cachent : foulards, coiffures stratégiques, évitement du miroir.
Mais derrière ce camouflage, il y a de la honte, alors qu’il devrait y avoir de la compassion.

En tant que coiffeuse, j’ai appris à regarder autrement.
Pas avec les yeux… avec le cœur.

Sous chaque chevelure manquante, il y a une histoire de courage et de résilience.
Et chaque rendez-vous est une occasion de redonner de la douceur à ce lien abîmé entre soi et ses cheveux.


🧒 Trichotillomanie chez l’enfant : un appel à écouter, pas à minimiser

Si vous êtes maman ou papa et que vous voyez votre enfant s’arracher les cheveux,
ce n’est pas un jeu, ni une mauvaise habitude.

Ce n’est pas “rien”. Ce n’est pas “comme se ronger les ongles”.

Plus l’enfant commence jeune, plus le cycle naturel du cheveu risque d’être perturbé.
Et un jour, à force de répétitions, certains cheveux ne repoussent plus — ou repoussent plus fins, moins denses.

Ma plus jeune cliente atteinte de trichotillomanie avait 7 ans.
Sa maman, pleine d’amour, pensait que ce n’était qu’une phase.
Mais quand elle a vu les petites zones clairsemées, elle a compris que quelque chose n’allait pas.

Ce n’était pas de la coquetterie, ni de la curiosité.
C’était un geste pour apaiser une émotion trop forte pour un si petit cœur.

Alors, si vous voyez ce comportement, ne grondez pas. Écoutez.
Cherchez à comprendre ce qui se cache derrière ce besoin.
Et si cela continue, parlez-en à un professionnel : psychologue, pédopsychiatre, ou coiffeur bienveillant formé à repérer ces signes.

Derrière ces gestes, il n’y a pas de bêtise.
Il y a un appel au secours… souvent muet, mais sincère.


🌷 Conseils et soutien au quotidien

Quelques pistes douces pour accompagner la guérison :

  • Tenir un petit carnet des moments où l’envie d’arracher survient.

  • Occuper ses mains : balle anti-stress, tricot (oui oui tu as bien lu), bijou à manipuler.

  • Couvrir la tête si cela apaise, sans honte. bien que tu ne doives pas avoir honte de qui tu es, ni de ce que tu traverse. 

  • Chercher un thérapeute spécialisé en TCC ou BFRB.

  • En parler. Même une fois, à la bonne personne.

Mettre des mots sur sa douleur, c’est déjà la réparer un peu.


💫 Une mèche à la fois

La trichotillomanie ne définit pas une personne.
Elle raconte juste une période où le corps a parlé plus fort que la bouche.

Et quand le silence devient trop lourd,
il suffit parfois d’une oreille attentive, d’un regard sans jugement,
ou d’une main qui, au lieu d’arracher, caresse doucement la mèche qui repousse.

Parce qu’à chaque repousse, il y a un peu d’espoir.
Et que même les cheveux abîmés finissent par retrouver leur force…
une mèche à la fois.

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